Reflexion sur les notions
d’outils, de savoir-faire
et d’autonomie
Reflexion sur les notions
d’outils, de savoir-faire
et d’autonomie
Les outils
Qu’est-ce que le savoir faire aujourd’hui ?
A l’heure où les magasins de bricolage font plus de bénéfices que la Fnac et Virgin, on peut en effet se poser la question.
Qui parmi nous connaît quelqu'un qui a bâti sa maison ?
Comment penser le fait que nous soyons aujourd’hui si démunis concernant notre propre entretien ?
Comment ne pas réagir lorsque dans le métro (ou ailleurs) on lit quelque message semblant s’adresser à un enfant de dix ans : « Je laisse la place du cœur » au lieu du bon vieux « place réservé aux femmes enceintes et aux invalides »
Sans savoir, et sans savoir faire (qui est son corollaire) nous ne sommes que des enfants à la merci de qui nous habille et nous nourri.
Savoir faire est comme une assurance autonomie (mais pas celle qu’ils nous vendent pour notre vieillesse). C’est par notre industrie notre capacité à faire, que nous construisons un rempart contre l’industrie qui est le lieu de la division. L’industrie sépare, divise l’être, elle éloigne les buts. Elle nous condamne à travailler sans fin. Sans but pour mieux nous aliéner. Elle nous impose la consommation comme consolation.
Elle accapare le faire et le savoir, et les outils puissants. Puissants comme des armes.
Elle nous fait croire que travailler sans but, sans fin, serait la quintessence du sens de la vie.
Que cherchons-nous à atteindre? Nous nous trouvons de fait face à une crise du « but ». Si la vie passe à consacrer 90% du temps pour satisfaire les besoins les plus basiques (logement, nourriture) quel est le sens du mot « progrès » dans ces conditions, sachant que dans les sociétés sauvages on consacre trois heures par jour pour satisfaire ces besoins là ?
Donc la crise est en réalité une crise du progrès (et pas seulement une crise politique, économique ou même sociale).
Ce qui veut dire que la question des savoir faire et des outils se pose de manière aigue. Notamment de l’appropriation de ce que j’appelle les outils puissants. Les outils puissants sont tous ceux qui de près ou de loin sont liés aux ordinateurs et aux moyens mécano-numérique d’action sur la matière et sur la pensée.
Nous ne pouvons laisser l’industrie et ses « propriétaires » accaparer les moyens modernes de production, sous peine d’être nous même rejetés de la modernité, et de l’âge adulte. On pourrait développer le thème de la licence, qui fait que quand vous achetez un outil puissant (par exemple un logiciel de conception d’objet, ou de broderie), contrairement à un outil ordinaire comme un marteau par exemple que vous pouvez donner , revendre d’occasion, ou même reproduire si vous voulez, vous n’en êtes pas propriétaire, seulement utilisateur, vous n’avez pas le droit de le donner, de vous en servir pour apprendre à un néophyte.
C’est pourquoi il est absolument nécessaire de développer des savoirs à double niveaux.
Il faut connaître les techniques anciennes, en gros tout ce qui ne nécessite pas d’électricité, mais il ne faut pas leur laisser tout ce que l’ingéniosité, le génie humain a pu inventer. C’est à nous tous, et nous devons les utiliser pour leur donner un but et une finalité différente.
C’est une posture politique au confluent de l’écologie, de l’économie et du social.
Ceux qui souhaitent résister à cette crise du progrès ne doivent pas abandonner la maîtrise des outils puissants. Il faut au contraire leur donner un sens qui s’articule dans une dialectique, avec la maitrise des techniques anciennes qui elles mêmes s’articulent avec des valeurs dons nous avons le plus grand besoin aujourd’hui comme le respect du vivant, l’économie (au sens économe des ressources), le sentiment de gratitude envers celui qui nous nourri (homme ou bête), le sentiment de la beauté qui nous apaise, le sentiment de la grandeur de la nature (et l’effroi un peu aussi) qui génère un élan spirituel qui nous grandit.
Nous sommes Homo faber qui a comme corollaire Homo sapiens.
Et pas l’inverse